À mesure que l’art contemporain africain et l’immense diversité du patrimoine culturel du continent conquièrent le monde, l’opportunité de vivre des expériences uniques, privilégiées et sur mesure favorise la montée du tourisme de luxe sur le continent. Et son potentiel pour l’économie régionale est important. Mais pour que le secteur du tourisme de luxe et de l’ultra-luxe tienne ses promesses, il est essentiel, dès aujourd’hui, de porter une attention maximale sur plusieurs facteurs dont celui de la formation aux métiers dédiés.
Alors que la crise du Covid-19 avait semblé remettre en cause le tourisme de masse, le tourisme de luxe, lui, n’a jamais eu autant de potentiel en Afrique. La croissance spectaculaire des économies africaines depuis les années 2000 crée un formidablement engouement pour un continent riche en espaces naturels et en patrimoine culturel. Il bénéficie également d’un regain d’intérêt, à la fois auprès des classes moyennes et supérieures africaines et des touristes du monde entier, désireux de voyager et de consommer différemment de manière intra-régionale. Et le potentiel est là : avec 84,2 millions de visiteurs en 2019, le secteur représente 10 % des emplois et 8,5 % du PIB continental.
Côte d’Ivoire et Rwanda : deux visions à long terme pour le tourisme de luxe et de l’ultra-luxe
À mesure que l’art contemporain africain et l’immense diversité du patrimoine culturel du continent conquièrent le monde, l’opportunité de vivre des expériences uniques, privilégiées et sur mesure deviennent l’argument moteur. Les pays élaborent une vision stratégique de leur développement économique à travers le tourisme d’affaires et de loisirs, comme la Côte d’Ivoire, à travers le programme « Sublime Côte d’Ivoire », et le Rwanda, qui mise notamment sur le Kivu, destination privilégiée de la clientèle ultra-luxe internationale dans la région des Grands Lacs.
De la rencontre unique avec les gorilles des Virunga au Rwanda, en passant par les plages d’Assinie, de San Pedro et la future baie de Cocody en Côte d’Ivoire, le tourisme de luxe met en lumière des joyaux naturels et culturels. Il favorise aussi des projets concrets qui supplantent les préjugés misérabilistes et d’un autre temps, dans des pays qui, aujourd’hui, peuvent proposer des expériences premuim, bonne gamme ou ultra-luxe. On notera par exemple le yachting, le superyachting et autres activités nautiques dernier cri, la gastronomie, l’hôtellerie de prestige et le shopping de luxe, dans un cadre contemporain et respectueux des codes culturels locaux.
Le regard extérieur de cette clientèle fortunée révèle le caractère exceptionnel des ressources culturelles et naturelles africaines. On peut citer l’artisanat des différents peuples, leurs croyances et réalisations, les parcs naturels et la faune, le patrimoine culinaire et les vertus de l’hospitalité et du sens de l’accueil. Toutes ces richesses exigent d’être mises en valeur dans le cadre d’une expérience mêlant confort absolu et surprise perpétuelle.
Le tourisme de luxe est ainsi le fer de lance de la reconquête de l’image d’un pays, voire d’un nouveau récit à l’échelle du continent tout entier.
C’est une démarche particulièrement parlante pour cette niche de nouvelle génération, qu’elle soit africaine ou non. Nous voyons des consom’acteurs, nés entre 1980 et 1995, détenant un fort pouvoir d’achat, qui ont été éduqués, notamment en matière de luxe. Ils sont exigeants, connectés, décomplexés et soucieux de l’impact sociétal du monde qui les entoure. Ces nouveaux touristes, appelés aussi les HNW/UHNW Millenials, sont avides de découvertes et d’expériences inédites, plutôt que de consommation d’accessoires à outrance.
Un levier de croissance qui nécessite une offre de formation à la hauteur
Mais pour que le secteur du tourisme de luxe et de l’ultra-luxe tienne ses promesses, pour que l’Afrique centrale et l’Afrique de l’ouest où cette branche du tourisme est très timide ou inexistante, soit la locomotive des myriades de secteurs économiques, dont il dépend et qu’il nourrit (agriculture, infrastructures, hôtellerie-restauration, artisanat, transports, musées, activités commerciales internationales de luxe, etc.), il est essentiel, dès aujourd’hui, de porter une attention maximale sur la formation aux métiers du tourisme.
En effet, c’est la première image qu’auront les visiteurs du pays hôte d’une part et d’autre part, c’est une opportunité pertinente de développer une offre de formation proprement africaine, promouvant l’égalité des chances, en permettant à des jeunes de se former chez eux, sans avoir à affronter les multiples difficultés de l’expatriation.
C’est en outre un formidable levier de croissance : tirée par les grands investissements publics et privés, avec du capital-investissement stratégique réalisé pour la mise en œuvre du plan national de transformation, la croissance rwandaise était de 10 % en 2019, le secteur touristique représentant 13 % du PIB et générant 132 000 emplois. En Côte d’Ivoire, cette croissance se vérifie aussi, avec 4,2 millions de visiteurs qui génèrent 7,3 % du PIB en 2019, contre 6,25 % en 2018. L’enjeu est donc de taille, et force est de constater que pour autant, les compétences ultra pointues exigées dans l’industrie touristique de luxe font encore défaut, ne permettant pas à l’Afrique de capitaliser pleinement sur ses atouts.
Des initiatives encore débutantes
Cette formation à l’accueil et au service ne s’improvise pas. Elle obéit à des codes internationaux, dont seule la maîtrise permettra le développement d’un secteur touristique de luxe digne de ce nom. Des établissements professionnels se sont engagés sur ce chemin, comme les écoles hôtelières de Grand Bassam, Vatel ou encore l’établissement Cheick Cissé au Mali, du groupe hôtelier Azalai, qui dispensent une formation de base. Mais il faut pousser les ambitions plus loin encore pour répondre à une demande et positionner les pays à fort potentiel pour le tourisme de luxe.
D’autant qu’il a déjà été identifié combien le tourisme de luxe pouvait renforcer l’attractivité d’un pays, rehausser le prestige international, entraîner le reste de l’économie, séduire les investisseurs internationaux et leur permettre de développer un « soft power », que ne possèdent que les pays dont le nom est devenu symbole d’élégance, de vision, d’audace et de raffinement. Par la même occasion consolider les relations PPP et les liens diplomatiques.
(*) Après une carrière dans la finance internationale, en 2016 Coralie Omgba crée de toutes pièces la conférence sur luxe global de niche en Afrique subsaharienne « Africa in à New Era » qu’elle anime chaque année. Elle s’emploie en tant qu’associé, consultante et business developer dans le secteur du luxe en Afrique, notamment dans le tourisme de luxe s’adressant à la clientèle UHNW et MHNW. Simultanément, Coralie est conseillère en gestion privée spécialisée dans l’investissement passion. Présidente-fondatrice de l’association à but non lucratif OKIRI, qui à pour mission de soutenir des jeunes talents originaires et basés sur le continent, désireux de poursuivre une formation professionnelle en hôtellerie et restauration de luxe en partenariat avec la meilleure école hôtelière au monde, en faveur du développement du tourisme de luxe sur le continent africain.
Source : La Tribune Afrique