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Uniformisation des coefficients au collège : une solution de façade face au défi de l’accès à la Terminale C, selon la députée de la Transition, l’honorable Justine Judith Lekogo

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Face au faible accès des élèves gabonais aux filières scientifiques, l’État a décidé d’uniformiser les coefficients dans toutes les matières du collège. Une mesure présentée comme un levier de réduction des échecs scolaires.

Mais pour la députée de la Transition, l’honorable Justine Judith Lekogo, cette réforme n’est qu’une solution de façade, déconnectée des véritables enjeux. Elle contourne le problème central : la maîtrise insuffisante des mathématiques dès le primaire.

Un diagnostic sans appel

Mme Lekogo rappelle que, selon l’évaluation internationale PASEC 2019, près d’un élève gabonais sur trois (33,3 %) termine le primaire sans atteindre le niveau « suffisant » en mathématiques. À titre de comparaison, seuls 6,7 % échouent à ce seuil en lecture. Le contraste est frappant : le Gabon figure parmi les meilleurs en compréhension écrite en Afrique francophone, mais reste en grande difficulté en mathématiques.

Pour la députée, ces lacunes précoces constituent un verrou majeur pour l’accès aux séries scientifiques au lycée, en particulier la série C, alors même que le pays manque cruellement d’ingénieurs, de chercheurs et de cadres scientifiques.

Une mesure qui simplifie, mais qui ne transforme pas

La réforme adoptée par le ministère de l’Éducation nationale harmonise désormais les coefficients des matières au collège : chacune compte pour un. Cette uniformisation vise à réduire les écarts entre établissements et à faciliter le calcul des moyennes.

Si l’intention peut paraître louable, l’honorable Justine Judith Lekogo souligne que, dans la pratique, la mesure ne change rien à la qualité de l’enseignement, ni au temps consacré aux matières scientifiques. Elle ne corrige pas non plus les inégalités sociales ou sanitaires qui freinent la progression scolaire.

Au contraire, prévient-elle, le risque est grand de créer un « succès statistique » , des moyennes artificiellement gonflées sans progression réelle des compétences.

Les leviers qui font la différence

Pour Mme Lekogo, les expériences menées en Afrique subsaharienne sont claires : ce ne sont pas les coefficients qui déterminent la réussite, mais la pédagogie, le suivi régulier des acquis et le soutien social.

Au Gabon, plusieurs axes lui paraissent incontournables :

• renforcer la remédiation en mathématiques dès la 6e et la 5e avec des approches ciblées comme le Teaching at the Right Level ;

• augmenter le temps et le poids des sciences en 4e et 3e, avec des ateliers scientifiques et une pondération renforcée en mathématiques et physique-chimie ;

• coacher les enseignants à travers un accompagnement en classe, des guides pédagogiques et des communautés de pratique ;

• investir dans la santé scolaire : repas, dépistages visuels, déparasitage, hygiène menstruelle pour les filles ;

• soutenir les élèves vulnérables par des bourses, aides de transport et dispositifs spécifiques pour les filles en milieu rural.

L’urgence d’un paquet intégré de réformes

La députée plaide pour une approche beaucoup plus globale : conserver l’harmonisation comme simplification administrative, mais l’inscrire dans un plan cohérent de réforme éducative.

Ce plan devrait articuler :

• une maîtrise renforcée des mathématiques avant l’orientation en seconde,

• une meilleure valorisation des enseignants,

• une santé scolaire systématisée,

• et un accompagnement social garantissant l’équité.

*Miser sur les résultats*

L’honorable Justine Judith Lekogo insiste que pour éviter l’effet d’annonce, toute réforme devrait s’accompagner d’indicateurs précis, tels que la progression du nombre d’élèves atteignant le seuil national en mathématiques, la part des enseignants formés et accompagnés, la réduction de l’absentéisme, ou encore l’augmentation des effectifs en série C, notamment parmi les filles et les élèves ruraux.

En somme, pour Mme Justine Judith Lekogo, l’uniformisation des coefficients, isolée, demeure une réponse superficielle à un problème de fond. Le véritable défi du Gabon est de hisser le niveau mathématique de ses élèves, de leur offrir un encadrement pédagogique solide et de lever les obstacles sociaux et sanitaires qui brident leur réussite.

Sans cette approche intégrée, prévient-elle, le pays risque de produire des cohortes d’élèves « artificiellement admis », mais insuffisamment préparés pour affronter les filières scientifiques, pourtant vitales pour l’avenir du Gabon.

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